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Histoire

préhendoient encore plus la fin du dîner & le départ des Domestiques. Elles en étoient aimées. Ceux qui servoient à table avoient la vue baissée & le visage allongé. Ils parurent fort aises, lorsqu’ils eurent la liberté de se retirer.

Alors Caroline se leva de sa chaise, fit une révérence d’assez mauvaise grace, de l’air d’une petite fille, qui est encore à l’école, les bras croisés devant elle, & se mit en chemin vers la porte. Mon Pere lui laissa faire les honneurs ; & je me levai aussi pour la suivre. Mais lorsqu’elle fut prête à sortir, il la rappella. J’ose dire qu’il ne l’avoit laissée aller si loin, que pour se faire un plaisir de son embarras, surtout à son retour. Qui vous ordonne de sortir ? lui dit-il. Où allez-vous, Caroline ? Revenez, Charlotte. Mais voilà ce qui arrive toujours ; la compagnie d’un Pere devient à charge, lorsqu’on s’est mis l’amour dans la tête. Charmant motif, pour approuver une passion qui ne lui laisse que le second ou le troisieme rang dans l’affection de ses filles, après y avoir tenu la premiere place. Vous verrez que je serai fort heureux, à la fin, si mes enfans ne me regardent pas comme leur Ennemi. Revenez toutes deux, vous dis-je.

Nous nous étions arrêtées, lorsqu’il avoit commencé à parler. Il fallut retourner sur nos pas, avec autant d’embarras que nous en avions eu à partir. Asseyez-vous, nous dit-il. Nous demeurâmes devant lui, les