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du Chev. Grandisson

LETTRE CXXXVI.

Miss Jervins à Mylady Grandisson.

19 Mai.

Depuis plusieurs jours, ma très-chere Mylady, j’ai quelque chose à vous communiquer, qui demande votre avis ; mais quand je pense à mon âge, je suis toute confuse. Aurez-vous la bonté de me garder le secret, & pour le monde entier, sans excepter mon Tuteur ? car en vous écrivant, je crois écrire à lui, parce que vous connoissez le fond de son cœur, & que vous êtes la prudence même. Il est vrai, que par rapport à lui, je me suis un peu oubliée, ou plutôt qu’il s’en est peu fallu : mais j’étois captivée par ses perfections, par sa grandeur d’ame, rien de plus en vérité. Une Fille, quelque jeune qu’elle soit, ne peut-elle pas admirer la bonté dans un excellent Homme ? La reconnoissance lui est-elle défendue pour les bienfaits ? à la vérité, cette reconnoissance peut aller trop loin, à mesure qu’on avance en âge ; & je me suis apperçue du danger : mais le remede n’est pas venu trop tard, graces au Ciel ! graces à vous, chere Mylady, qui m’avez prêté votre secours ! Qu’il faut être bonne, pour souffrir qu’on vous entretienne sur un point si délicat ! Mais vous êtes la