III
LARMES D’ARSOUILLE
Les voyous les plus noirs sont fous de la campagne.
L’hiver ils vivent dans Paris ainsi qu’au bagne,
captifs. La liberté pour eux, c’est le printemps.
Aussi, lorsque l’hiver les lâche, ils sont contents.
Pour recevoir Avril, plus d’un se débarbouille,
Et le nouveau soleil illumine l’arsouille.
Il va, droit devant lui, rêveur, sans savoir où,
Gambadant comme un chien et chantant comme un fou
Rien qu’à voir les talus, les fossés et les buttes.
C’est là que, tout gamin, il faisait des culbutes ;
C’est là, les soirs d’été, qu’il se gavait le flan ;
C’est là qu’il enleva son premier cerf-volant ;
C’est là qu’il vint un jour avec Jeanne, la sienne,
Du temps qu’elle portait un tablier d’indienne ;
C’est là qu’en rougissant ils s’assirent, très las,
Et que leur amour frais fleurit comme un lilas.
Or, l’on a beau, depuis, avoir oublié Jeanne,
Vivre comme un cochon, s’abrutir comme un âne,
Après tout on n’est pas un sans-cœur, n’est-ce pas ?