Page:Richepin - La Mer, 1894.djvu/285

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
271
les grandes chansons

Et, désormais silencieux.
Le globe à travers ses murailles
Laissant fuir ses ordes entrailles
Ressemblerait aux funérailles
D’une charogne dans les cieux.

Garde-nous de ce jour sinistre
Et de ce trépas empesté,
Ô sel préservateur, ministre
Suprême de la pureté,
Ô sel dont la saine magie
De l’être entretient l’énergie,
Ô sel des miasmes redouté,
Feu dont ils craignent les morsures,
Fier archer dont les flèches sûres
Leur font de cuisantes blessures,
Sel, héros au glaive enchanté !

Ô sel désinfecteur du monde.
Mystérieux, blanc, radieux.
Gai, subtil, vainqueur de l’immonde,
Sel, unique plaisir des vieux,
Ô sel qu’on pose sur la lèvre
Du mourant, de l’enfant qu’on sèvre,
Sel de bienvenue et d’adieux,
Ô sel dont nos larmes sont faites,
Givre qui pâliras les faites
Du temple où les derniers prophètes
Annonceront les derniers Dieux !