Libres et fiers, exempts de toute idolâtrie,
Ils méprisaient les lois, les sciences, les arts.
Ils n’avaient ni foyer, ni temple, ni patrie,
Et ne croyaient à rien si ce n’est aux hasards.
Oui, ce sont mes aïeux, à moi. Car j’ai beau vivre
En France, je ne suis ni Latin ni Gaulois.
J’ai les os fins, la peau jaune, des yeux de cuivre,
Un torse d’écuyer et le mépris des lois.
Oui, je suis leur bâtard ! Leur sang bout dans mes veines,
Leur sang, qui m’a donné cet esprit mécréant.
Cet amour du grand air et des courses lointaines,
L’horreur de l’Idéal et la soif du Néant.
Que de fois, dans les champs déserts, sur les rivages,
La nuit, ai-je entendu, frénétique et joyeux,
Des galops enragés, des musiques sauvages,
Qui versaient dans mon cœur le cœur de mes aïeux !
Et je les redirai, ces chansons de voyages
Pleines d’orgueil farouche et d’appétit brutal.
Parlant de liberté, de meurtres, de pillages,
Sur des rhythmes criards aux rimes de métal.
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