Page:Richet - Traité de métapsychique.djvu/19

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

L’histoire des sciences nous apprend que les découvertes les plus simples ont été repoussées, à priori, sous prétexte qu’elles étaient contradictoires avec la science. L’anesthésie chirurgicale fut niée par Magendie. Le rôle des microbes a été contesté pendant vingt ans par tous les académiciens de toutes les Académies. Galilée a été mis en prison pour avoir dit que la terre tourne. Bouillaud a déclaré que le téléphone n’était que de la ventriloquie. Lavoisier a dit que nulles pierres ne tombent du ciel, parce qu’il n’y a pas de pierres dans le ciel. La circulation du sang n’a été admise qu’après quarante ans de stériles discussions. Dans un discours prononcé en 1827, à l’Académie des Sciences, mon arrière-grand-père, P.-S. Girard, considérait comme une folie l’idée qu’on peut par des conduits amener de l’eau dans les étages élevés de chaque maison. En 1840, J. Müller affirmait qu’on ne pourra jamais mesurer la vitesse de l’influx nerveux. En 1699, Papin construisait un premier bateau à feu. Cent ans plus tard, Fulton refaisait cette découverte, et elle ne fut reconnue applicable à la navigation que vingt ans après. Quand, en 1892, guidé par mon illustre maître Marey, je faisais mes premiers essais d’aviation, je n’ai trouvé qu’incrédulité, dédain et sarcasme. On pourrait écrire tout un volume en contant les billevesées qui furent dites, au moment de chaque découverte, contre cette découverte même.

Remarquons qu’il n’est pas ici question du vulgaire ; — l’opinion du vulgaire est sans importance, — mais des savants. Or les savants s’imaginent qu’ils ont tracé des limites que la science future ne saurait franchir. Comme le dit spirituellement C. Flammarion, « passés à l’état de bornes, ils jalonnent la route du progrès ».

Lorsqu’ils déclarent que tel ou tel phénomène est impossible, ils confondent très malheureusement ce qui est contradictoire avec la science, et ce qui est nouveau dans la science. Il faut insister ; car c’est là la cause profonde du cruel malentendu.

Les corps se dilatent par la chaleur. Alors, si quelqu’un vient nous dire que le mercure, le cuivre, le plomb, l’hydrogène, dans les conditions habituelles de notre expérimentation, ne se dilatent pas

    notre époque : il ne daigne ni regarder, ni étudier, ni essayer de comprendre. Il nie. C’est beaucoup plus facile.