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MONITIONS 305

pas. La vieille opiniou des médecins aliénistes, que l'hallucination est le meilleur signe d'une maladie mentale, et la caractéristique infaillible de l'aliénation, cette opinion me paraît encore absolu- ment valable. Sauf exception — car il y a toujours des exceptions à tout — un individu normal, sain, éveillé, n'a pas d'hallucina tions. S'il voit des apparitions, c'est que ces apparitions ont une réalité objective quelconque.

En définitive, il n'y a d'hallucinations, quand toute réalité objec- tive fait défaut, que chez les aliénés et les alcooliques.

Mais il faut bien s'entendre sur ce mot réalité objective. Par exemple, pour prendre un cas concret, à Menton, Mad. Bagot voit son petit chien Judy traverser la salle à manger, et cela au moment même où, en Angleterre, Judy vient de mourir. Ce n'est pas une hallucination dans le sens ordinaire du mot, car l'image qui a apparu répond à un phénomène réel : la mort de Judy. Mais, d'autre part, nous n'irons pas prétendre qu'il y a eu dans la salle à manger de Menton un fantôme de Judy, avec un dégagement d'énergies mécaniques et lumineuses, correspondant à une fautasmisation de Judy. Le phénomène matériel extérieur qui a fait naître chez Mad. Bagot l'image de Judy, nous demeure, quant à sa nature même, profondément inconnu, et il est probablement tout différent d'une fautasmisation. Et je ne vais pas, avec quelques théoriciens outranciers du spiritisme, soutenir que le corps fluidique de Judy s'est transporté de Londres à Menton. Tout de même, il y a une rela- tion entre la mort de Judy et la vision de Mad. Bagot. C'est une monition, qui, par une voie quelconque, inconnue, mystérieuse, a touché l'intelligence de Mad. Bagot, et alors cette monition s'est présentée à elle sous uue forme adaptée à l'intelligence humaine, c'est-à-dire par un phénomène visuel.

Eu tout cas, on ne peut assimiler cette vision à l'hallucination d'un aliéné, car il y avait une réalité objective (la mort de Judy) qui a été la cause déterminante de cette vision, à la fois véridique et symbolique.

Nous n'emploierons donc pas le mot hallucination (car l'halluci- nation que ne conditionne aucune réalité externe est un phénomène morbide), mais seulement le mot de monition, qui signifiera une hallucination à la fois véridique et symbolique.

Richet. — Métapsychique. 20

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