Page:Rignano, La question de l’héritage, 1905.djvu/84

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terait lui coûteraient soit 1, soit 1 ½, soit même 2 milliards de plus que ne lui rapporteraient les terres qu’il aurait expropriées »[1].

De là, la nécessité de renoncer absolument à une idée de rachat, qui impliquerait la permanence de la constitution actuelle de la propriété.


Certains collectivistes prétendent obtenir la nationalisation en accordant aux détenteurs actuels du capital une « suffocante abondance de moyens de jouissance », c’est-à-dire une faculté d’achat, un droit de prélèvement sur le produit total d’une valeur égale au montant de leurs richesses, mais qui ne pourrait plus d’ailleurs se retransformer en moyens de production. Dans cette hypothèse, la forme du droit de propriété demeure inaltérée : il n’en est pas moins, en réalité, profondément modifié par la forte restriction qu’apporterait au droit d’usage actuel sur les biens possédés l’empêchement de les transformer de moyens de jouissance en moyens de production. Mais comment, surtout au commencement du régime collectiviste, au moment où, par l’expropriation, il se substituerait à l’actuel, pourrait-on effectivement empêcher les indemnités obtenues de se retransformer en capitaux techniques et en capitaux-salaires ? On compterait en vain sur les prohibitions légales

  1. Paul Leroy-Beaulieu, Le collectivisme, Paris, Guillaumin, 1893, pages 167-169. Voir aussi Henry George, Progress and Poverty (Kegan Paul, Trench, Trübner et Co, London), pages 255 à 257.