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Page:Rilke - Poésie (trad. Betz).pdf/18

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Combien toujours me touchent
les vieux airs de Bohême.
Dans mon cœur ils insinuent
leur tristesse et le font lourd.

Lorsqu’un enfant quelque part
en sarclant fredonne,
sa chanson me poursuit
jusqu’en songe, la nuit.

L’Italie bientôt prête au jeune poète ses images plus précises et les résonances de son passé. Voici Venise où

de légères gondoles, comme de noires pensées,
glissent dans le soir.

Florence, où son

muet étonnement
éveille tous les anges d’airain.

Partout il cueille, butine et amasse :

Regarder loin dans les pays
Jusqu’aux confins du ciel…

Et ce ciel lui-même, symbole de l’infini, doit entrer, avec ses nuages et ses changeantes nuances, dans la vie de Rilke qui ne se fixe nulle part, dans sa poésie qui se prépare seulement, de loin, comme devinée par éclairs :