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LA MER ET LES POISSONS.

enfantera encore des merveilles, mais la science dont nous parlent les aquiculteurs n’existe pas, que nous sachions ; cette prétendue culture du poisson, dont l’origine remonte aux Romains et qui n’a pas fait un pas depuis deux mille ans, ces pratiques d’élevage qui infertilisent la mer sous prétexte de la fertiliser, ne sont pas la science. Quelles sont donc les raisons qui autorisent à penser que l’objection tirée de l’impossibilité de reproduire fidèlement, dans un espace restreint, les conditions variées de la mer, ne paraît pas devoir résister à un examen sérieux ?

Aux difficultés invincibles de la culture des produits marins, on oppose les difficultés, presque toujours surmontables, de la culture des produits terrestres, et, sans se demander si cette comparaison ne serait pas hors de propos, on affirme que nous devons cultiver les uns parce que nous sommes parvenus à cultiver les autres. En vain établissons-nous que rien, dans l’état constitutionnel de la faune marine, ne laisse supposer l’utilité d’une culture des richesses aquatiques ; on nous répond : « Ce ne sera pas avec des assertions et des arguments contestables que l’on arrêtera l’élan qui pousse l’homme à se créer de nouvelles ressources d’alimentation. »

Certes non ; les arguments ne sont pas des barrières infranchissables, mais ce n’est pas non plus par des considérations générales s’appliquant à tout et ne s’appliquant à rien particulièrement, que l’on arrive à infirmer une proposition spéciale, sérieuse et logiquement développée. Or, nous disons et nous prouvons que l’aquiculture, fût-elle une science au lieu de n’être qu’une prétention, ne cesserait pas pour cela d’être une vaine découverte.

Et, en effet, est-ce que les eaux, fertiles par elles-mêmes, ne repoussent pas toute idée d’en cultiver les fruits ? On se borne à nier ; nous affirmons et nous examinons.