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Page:Rimbaud - La Mer et les poissons, 1870.djvu/15

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LA MER ET LES POISSONS.

fonctions mécaniques les fonctions naturelles, dans l’organisme d’un être animé.

Voilà comment nous distinguons entre ce que l’homme peut et ce qu’il ne peut pas, dans ses louables velléités de soumettre à son empire l’application des lois de la nature. S’il peut quelquefois en imiter les résultats, il ne peut jamais en asservir les causes. On ne pense pas, présumons-nous, que l’homme soit capable, à l’aide d’une contrefaçon de l’œuvre de Dieu, d’émettre une image réduite de l’atmosphère terrestre. Lui serait-il plus facile de façonner une reproduction de l’atmosphère marine, de ce fluide dans lequel respire la faune des mers ?

On ne l’ignore point, de même que l’air, l’eau se compose de divers éléments qui se produisent, se mêlent, s’agrègent, se consument, s’évaporent et se renouvellent dans une mesure réglée et par des voies et moyens que nous ne pouvons ni arrêter, ni modifier, d’une manière générale. S’il n’est point en notre pouvoir de régir la constitution de l’air, il ne nous appartient pas davantage d’exercer une action pondératrice sur la constitution de l’eau. L’un est aussi impraticable que l’autre, et, supposer que nous devons parvenir à vaincre la nature indomptablement sauvage de la mer, nous parait non moins étrange qu’il le serait d’entreprendre de ranimer la nature morte des terres polaires, ensevelies sous les frimas d’un ciel inclément.

« Mais, fait-on observer, nous avons tous les jours sous les yeux, le spectacle d’animaux arrachés à leur climat de naissance et prospérant à ravir sous le nôtre, bien que pour quelques-uns il présente des différences notables. On ne peut donc pas affirmer à priori que le poisson seul se refusera à subir cette loi providentielle et qu’il ne pourra sans péril être éloigné de la grande mer. »

C’est bien là l’idée fondamentale de l’aquiculture : nous cul-