Page:Riotor - Le Mannequin, 1900.djvu/73

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image, et plus jolie encore, puisqu’elle gardait en ses traits idéalisés l’expression céleste de l’irréalité. Nélida, en travesti, suivait chacun de ses pas, sautait de compagnie avec elle, la soutenant par son bras redressé… Puis le couple s’arrêtait, Nélida saisissait la taille de sa danseuse qui se pliait, se renversait, les bras éployés, la chevelure touchant le sol, puis se relevait… Debout, avec ses yeux immobiles et extatiques, tandis que Nélida la tenait la main haute, elle tournait sur les pointes avec une précision, une perfection que n’avait jamais atteinte Lili elle-même. Puis elle repartait par bonds, balançant la tête et le torse à droite et à gauche dans un mouvement de coquetterie adorable, semblant lutiner et regarder par dessus l’épaule de Nélida qui la poursuivait, l’indiscrète, en lui serrant la taille de ses deux mains tendues…

Le pas était nouveau, hardi. La salle éclata en applaudissements. Dans une loge d’avant-scène le duc de Bouillon agitait un bouquet… Lili Scotti s’était relevée, blême de fureur, et dans son patois romain se répandait en impré— cations.

Le directeur était avant tout un homme pratique. Donnant, donnant. Il était actuellement tout acquis à Vaucanson et au prince de Ligne.

— Tais-toi, Lili, murmura-t-il en la saisissant par le bras, retourne à ta loge, et vite.

— Oh ! arrachare li occhi a questo mecanico !