Les astres fourmillants emplissaient le ciel noir,
Ils songeaient, et, rêveurs, sans entendre, sans voir,
Sourds aux rumeurs des mers d’où l’ouragan s’élance,
Toute la nuit, dans l’ombre, ils pleuraient en silence ;
Ils pleuraient tous les deux, aïeux du genre humain,
Le père sur Abel, la mère sur Caïn.
LE LÉOPARD ET L’ÉCUREUIL
Un écureuil, sautant, gambadant sur un chêne,
Manqua sa branche, et vint, par un triste hasard,
Tomber sur un vieux léopard
Qui faisait sa méridienne.
Vous jugez s’il eut peur ! En sursaut s’éveillant,
L’animal irrité se dresse :
Et l’écureuil, s’agenouillant,
Tremble et se fait petit aux pieds de Son Altesse.
Après l’avoir considéré,
Le léopard lui dit : « Je te donne la vie,
Mais à condition que de toi je saurai
Pourquoi cette gaîté, ce bonheur que j’envie,
Embellissent tes jours, ne te quittent jamais,
Tandis que moi, roi des forêts,
Je suis si triste et je m’ennuie.
— Sire, lui répond l’écureuil,
Je dois à votre bon accueil
La vérité : mais, pour la dire,
Sur cet arbre un peu haut je voudrais être assis.
— Soit, j’y consens : monte. — J’y suis.
À présent je peux vous instruire.
Mon grand secret, pour être heureux,
C’est de vivre dans l’innocence :
L’ignorance du mal fait toute ma science ;
Mon cœur est toujours pur, cela rend bien joyeux.