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MANUEL DE LA PAROLE

dont on n’a jamais vu les talons ? Ce qu’il y a de certain, et ce que tout le monde peut vérifier à l’instant même sur la place publique, si ces louables études occupent encore quelques bons esprits, c’est que Polichinelle, roué de coups par les sbires, assassiné par les bravi, pendu par le bourreau et emporté par le diable, reparaît infailliblement un quart d’heure après, dans sa cage dramatique, aussi frisque, aussi vert et aussi galant que jamais. Polichinelle est mort, vive Polichinelle !

Ch. Nodier.


LE GLAND ET LA CITROUILLE


Dieu fait bien ce qu’il fait. Sans en chercher la preuve
En tout cet univers, et l’aller parcourant.
Dans les citrouilles je la trouve.
Un villageois, considérant
Combien ce fruit est gros et sa tige menue :
« À quoi songeait, dit-il, l’auteur de tout cela ?
Il a bien mal placé cette citrouille-là !
Eh ! parbleu ! je l’aurais pendue
À l’un des chênes que voilà ;
C’eût été justement l’affaire :
Tel fruit, tel arbre, pour bien faire.
C’est dommage, Garo, que tu n’es point entré
Au conseil de celui que prêche ton curé ;
Tout en eût été mieux ; car pourquoi, par exemple,
Le gland, qui n’est pas gros comme mon petit doigt,
Ne pend-il pas en cet endroit ?
Dieu s’est mépris : plus je contemple
Ces fruits ainsi placés, plus il semble à Garo
Que l’on a fait un quiproquo. »
Cette réflexion embarrassant notre homme :
« On ne dort point, dit-il, quand on a tant d’esprit. »
Sous un chêne aussitôt il va prendre son somme.
Un gland tombe : le nez du dormeur en pâtît.