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MORCEAUX CHOISIS

Dame mouche s’en va chanter à leurs oreilles,
S’assiedEt fait cent sottises pareilles.
Après bien du travail, le coche arrive au haut :
« Respirons maintenant, dit la mouche aussitôt :
J’ai tant fait que nos gens sont enfin dans la plaine.
Çà, Messieurs les chevaux, payez-moi de ma peine. »
Ainsi certaines gens, faisant les empressés,
S’assiedS’introduisent dans les affaires :
S’assiedIls font partout les nécessaires,
Et, partout importuns, devraient être chassés.

La Fontaine.


LE DRAPEAU


Voyez-vous, disait souvent le vieux capitaine en frappant sur la table, vous ne savez pas, vous autres, ce que c’est que le drapeau. Il faut avoir été soldat ; il faut avoir passé la frontière et marché sur des chemins qui ne sont pas ceux de la France ; il faut avoir été éloigné du pays, sevré de toute parole qu’on a parlée depuis l’enfance ; il faut s’être dit, pendant les journées d’étapes et de fatigues, que tout ce qui reste de la patrie absente, c’est le lambeau de soie aux trois couleurs françaises qui clapote, là-bas, au centre du bataillon ; il faut n’avoir eu, dans la fumée du combat, d’autre point de ralliement que ce morceau d’étoffe déchirée, pour comprendre, pour sentir, tout ce que renferme dans ses plis cette chose sacrée qu’on appelle le drapeau. Le drapeau, mes pauvres amis, mais sachez-le bien, c’est, contenu dans un seul mot, rendu palpable dans un seul objet, tout ce qui fut, tout ce qui est la vie de chacun de nous ; le foyer où l’on naquit, le coin de terre où l’on grandit, le premier sourire d’enfant, la mère qui vous berce, le père qui gronde, le premier ami, la première larme, les espoirs, les rêves, les chimères, les souvenirs ; c’est toutes ces joies à la fois, toutes enfermées dans un mot, un nom, le plus beau de tous, la patrie ! Oui, je vous le dis, le drapeau, c’est tout cela ; c’est l’honneur