Page:Rivard - Manuel de la parole, traité de prononciation, 1901.djvu/277

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
267
MORCEAUX CHOISIS

Et la vierge, entraînant la foule tout entière
Où déjà plus d’un front rougissait de remords,
Piqua sa jument blanche, et vint au champ des morts.
Or, monsieur saint Michel exauça la prière
Que murmurait tout bas la naïve guerrière ;
Et quand elle arriva dans le lieu du repos,
Les croix que l’on avait, pour ses nombreux tombeaux,
Faites hâtivement de deux branches coupées,
Par miracle et soudain, devinrent des épées,
Et le soleil brillait sur leurs gardes de fer,
Si bien qu’en ce moment chaque tombe avait l’air,
Avec l’ordre du ciel étant d’intelligence,
De présenter une arme et d’implorer vengeance.

Alors, Jeanne aux chrétiens à ses pieds prosternés,
Répéta simplement : « Armez-vous et venez !
Car Dieu fera cesser par moi votre souffrance
Et la grande pitié du royaume de France. »

F. Coppée.


NAPOLÉON I


Ô Corse à cheveux plats, que la France était belle
Une Au grand soleil de Messidor !
C’était une cavale indomptable et rebelle,
Une Sans freins d’acier ni rênes d’or,
Une jument sauvage, à la croupe rustique,
Une Fumante encor du sang des rois,
Mais fière, et d’un pied fort heurtant le sol antique,
Une Libre pour la première fois.
Jamais aucune main n’avait passé sur elle
Une Pour la flétrir et l’outrager ;
Jamais ses larges flancs n’avaient porté la selle
Une Et les harnais de l’étranger.