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sistance assurée et des richesses immortelles[1], agit contre ses intérêts & méconnoit son génie quand elle se livre à l’esprit de conquête. Son influence est si grande dans la paix & dans la guerre que, toujours maîtresse de donner l’une ou l’autre, il doit lui sembler doux de tenir dans ses mains la balance des Empires, & d’associer le repos de l’Europe au sien. Par sa situation elle tient à tous les États ; par sa juste étendue, elle touche à ses véritables limites. Il faut donc que la France conserve & qu’elle soit conservée ; ce qui la distingue de tous les Peuples anciens & modernes. Le commerce des deux mers enrichit ses Villes maritimes & vivifie son intérieur, & c’est de ses productions qu’elle alimente son commerce : si bien que tout le monde a besoin de la France, quand l’Angleterre a besoin de tout le monde. Aussi, dans les Cabinets de l’Europe, c’est plutôt l’Angleterre qui inquiete, c’est plutôt la France qui domine. Sa Capitale, enfoncée dans les terres, n’a point eû, comme les Villes maritimes, l’affluence des Peuples ; mais elle a mieux senti et mieux rendu l’influence de son propre génie, le goût de son terroir, l’esprit de son Gouvernement. Elle a attiré par ses charmes plus que par ses richesses ; elle n’a pas eu le mélange, mais le choix des Nations ; les gens d’esprit y ont abondé, &

  1. Il y a deux cents ans qu’en Angleterre, & en plein Parlement, un homme d’État observa que la France n’avoit jamais été pauvre trois ans de suite.