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comme les hommes. Ceux qui ont dans la Société une Famille & des Alliances étendues, y ont aussi une plus grande consistance. C’est ainsi que les mots qui ont de nombreux dérivés & qui tiennent à beaucoup d’autres, sont les premiers mots d’une Langue & ne vieilliront jamais ; tandis que ceux qui sont isolés, ou sans harmonie, tombent comme des hommes sans recommandation & sans appui. Pour achever le parallele, on peut dire que les uns & les autres ne valent qu’autant qu’ils sont à leur place. J’insiste sur cette analogie, afin de prouver combien le goût qu’on a dans l’Europe pour les Français, est inséparable de celui qu’on a pour leur Langue ; & combien l’estime dont cette Langue jouit, est fondée sur celle qu’on fait de la Nation.

Voyons maintenant si le génie & les Ecrivains de la Langue Anglaise auroient pû lui donner cette universalité qu’elle n’a point obtenue du caractère & de la réputation du Peuple qui la parle. Opposons cette Langue à la nôtre, sa littérature à notre littérature, & justifions le choix de l’Univers.

S’il est vrai qu’il n’y eut jamais ni langage ni Peuple sans mêlange, il n’est pas moins évident qu’après une conquête il faut du tems pour con-