Page:Rivarol - De l'universalité de la langue française.djvu/51

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On a beaucoup parlé de Louis XIV : je n’en dirai qu’un mot. Il n’avait ni le génie d’Alexandre, ni la puissance et l’esprit d’Auguste ; mais, pour avoir sû régner, pour avoir connu l’art d’accorder ce coup d’œil, ces foibles récompenses dont le talent veut bien se payer, Louis XIV marche dans l’histoire de l’esprit humain, à côté d’Auguste & d’Alexandre. Il fut le véritable Apollon du Parnasse Français : les Poëmes, les Tableaux, les Marbres, ne respirerent que pour lui. Ce qu’un autre eût fait par politique, il le fit par goût. Il avait de la grace, il aimoit la gloire & les plaisirs, & je ne sais quelle tournure romanesque qu’il eut dans sa jeunesse, remplit les Français d’un enthousiasme qui gagna toute l’Europe. Il fallut voir ses bâtiments & ses fêtes, & souvent la curiosité des étrangers soudoya la vanité française. En fondant à Rome une colonie de peintres et de sculpteurs, il faisoit signer à la France une Alliance perpétuelle avec les Arts. Quelquefois son humeur magnifique alloit avertir les Princes étrangers du mérite d’un Savant ou d’un Artiste caché dans leurs Etats, & il en faisoit l’honorable conquête. Notre Langue domina comme lui dans tous les Traités ; & quand il cessa de dicter des Loix, elle