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des syllabes chez les Grecs et les Latins.

Quoi qu’il en soit de la prose & des vers français, quand cette Langue traduit, elle explique véritablement un Auteur. Mais les Langues Italienne & Anglaise, abusant de leurs inversions, se jettent dans tous les moules que le texte leur présente ; elles se calquent sur lui, & rendent difficulté pour difficulté : je n’en veux pour preuve que Davanzati. Quand le sens de Tacite se perd, comme un fleuve qui disparaît tout-à-coup sous la terre, le Traducteur s’y plonge & se dérobe avec lui. On les voit ensuite reparoître ensemble : ils ne se quittent pas l’un l’autre ; mais le Lecteur les perd souvent tous deux.

La prononciation de la Langue Française porte l’empreinte de son caractère : elle est plus variée que celle des Langues du midi, mais moins éclatante ; elle est plus douce que celle des Langues du nord, parce qu’elle n’articule pas toutes ses lettres. Le son de l’e muet, toujours semblable à la derniere vibration des corps sonores, lui donne une harmonie légère qui n’est qu’à elle.

En considérant la Langue Latine comme la grosse planette, & les Langues d’Europe comme ses satellites, la nôtre paroît être à une distance plus