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les mendiants de la mort

en retour un papier chargé de timbres, dont elle n’examina point la teneur.

Munie de cette pièce, elle s’achemina vers la prison de la Force ; la matinée n’était pas achevée lorsqu’elle y arriva ; elle fut introduite auprès du directeur.

Celui-ci lut attentivement la lettre de Pasqual, qui lui était adressée, et le permis de la Préfecture, également remis entre ses mains par Robinette.

Sa décision, après ces deux lectures, se formula par ce peu de mots :

— Je n’ai point à m’opposer à cela.

Pasqual, en demandant à Robinette de venir a la prison le jour qu’il désignait, avait ajouté : « On te laissera pénétrer, jusqu’à moi. »

En effet, le directeur, passant dans la salle voisine, parla quelques instants à un gardien et finit en lui disant de conduire la jeune fille et ses deux compagnons à une chambre qu’il désigna.

Les trois personnes introduites dans la prison en parcoururent l’étendue en silence : Robinette, heureuse de revoir Pasqual encore une fois, et triste de le perdre ensuite pour toujours ; le petit marchand d’oiseaux, prenant déjà la physionomie de bonté grave et recueillie qu’on doit montrer à un condamné ; le pauvre François, tenant ses mains jointes et priant Dieu de toute son âme pour le malheureux prisonnier.

Robinette, en entrant dans la cellule, vit Pasqual étendu mort sur sa couche.

La jolie bohémienne pleura de douleur pour la première fois.

Pierrot se découvrit respectueusement, et François s’agenouilla devant le mort.

Le gardien expliqua alors à la jeune fille ce qu’elle ignorait entièrement. Pasqual se nommait Pierre Augeville ; il avait demandé, en offrant pour cela la somme d’argent nécessaire, à être transporté, après sa mort, dans le cimetière de Vaugirard et déposé dans la fosse sur laquelle une pierre tumulaire portait les noms de Pierre et Marie. C’était Robinette qui venait de présenter cette requête à la Préfecture et d’en rapporter le permis. Pierre avait également écrit au directeur de la prison, pour lui exprimer son désir et lui dire qu’il, chargeait les trois personnes par lesquelles sa lettre serait présentée d’exécuter sa dernière volonté et de prendre soin de sa dépouille mortelle.