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les mendiants de la mort

ses stores baissés, et en roulant au pas le plus rapide des chevaux.

En cheminant ainsi silencieusement, les voyageurs franchirent une barrière, puis un long faubourg, et laissèrent enfin toute habitation derrière eux.

Une fois hors de la portée des réverbères, le maître de la voiture leva les stores, et Herman, au milieu de la nuit aussi foncée que radieuse d’étoiles, aperçut la pleine campagne.

Après avoir marché deux ou trois heures, la calèche quitta le grand chemin, roula quelques instants sur un sentier de gazon et s’arrêta.

On était devant une petite maison entièrement fermée et qui ne laissait apercevoir aucune lumière. Cependant, la porte d’une cour s’ouvrit, et, arrivés là, les voyageurs descendirent de voiture.

Herman, dès qu’il eut mis pied à terre, regarda autour de lui. Gauthier était à ses côtés, mais l’élégant jeune homme qui était venu un jour visiter la prison de la Force et en enlevait maintenant le prisonnier, descendant par l’autre portière, avait déjà disparu.

— Il était temps d’arriver, dit Gauthier ; le ciel commence à blanchir au matin.

En même temps, il fit entrer Herman dans l’intérieur, et, l’usage de la lumière paraissant inconnu dans cette maison, il le conduisit en tendant les mains devant lui jusqu’à une chambre à coucher dont, malgré l’obscurité, on sentait d’abord, en entrant, le bien-être et l’agréable habitation.

Puis le vieillard, après avoir recommandé à Herman de se livrer bien vite au repos dont il avait tant besoin, se retira dans une pièce voisine.

En effet, après tant de cruelles fatigues de corps et d’âme, Herman, dès qu’il se sentit sous les rideaux soyeux de sa nouvelle couche, tomba dans un sommeil profond et dormit jusqu’à une heure très-avancée du lendemain.

En s’éveillant, il vit sur la tenture les rayons du soleil qui décrivaient régulièrement les lames d’une jalousie. L’atmosphère suave et légère qu’il respirait répandait dans ses veines une douceur et une force nouvelles.

Il se leva et ouvrit le vitrage de sa fenêtre. Son habitation était au milieu d’un enclos fermé sans doute depuis longtemps et empreint de ce charme que la solitude donne à la nature… Heureux abandon dans lequel toutes les allées