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les mendiants de la mort

Les fugitifs reconnurent alors que la voiture stationnant du côté de la rue Culture-Sainte-Catherine était celle qui les attendait, et ils tournèrent rapidement de ce côté.

La portière d’une calèche était ouverte, le marchepied baissé ; Herman allait s’élancer dans l’intérieur, lorsque Gauthier l’arrêta par un vif mouvement.

— Un instant, dit-il. Celui qui a veillé sur vous pendant votre captivité, qui vous sauve à présent exige de vous une seule chose en retour, comme preuve de votre reconnaissance.

— Oh ! dites !… parlez !

— C’est de ne pas lui adresser un seul mot tant que vous serez près de lui dans la voiture.

Herman fut étrangement surpris du genre de remerciements qu’on lui demandait, mais le temps pressait ; il se jeta dans le fond de la voiture, où une place était déjà occupée. Gauthier monta après lui.

Ne pouvant attribuer sa délivrance qu’à un de ses amis, Herman espérait bien, malgré le silence imposé par lui et le secret qu’il paraissait vouloir garder, le reconnaître au premier instant.

Mais l’intérieur de la calèche était complètement obscur ; il était impossible d’y découvrir aucune forme… Seulement, à un mouvement que fit l’inconnu en relevant la main, son mouchoir passa devant la portière où tombait un rayon de réverbère, et Herman reconnut le foulard blanc à bordure bleue que portait le jeune amateur de monuments en venant visiter la prison.

Les deux voitures s’ébranlèrent en même temps et s’éloignèrent par des chemins différents.

Pierre Augeville, après les longs orages des passions violentes, allait dans le petit cimetière abandonné, reposer auprès de Marie, sous le berceau d’églantiers. Herman, réhabilité par la plus douloureuse expiation, partait pour un but inconnu, mais où l’avenir lui réservait sans doute des jours moins sombres.


XV

l’inconnu

La voiture qui renfermait les deux fugitifs de la prison et leur protecteur inconnu, traversait la ville en tenant