Page:Robert Arnauld d'Andilly - Stances Pour Jésus-Christ.djvu/29

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XLV.

Mais nous voici, Seigneur, à l'heure destinée
Dans l'éternel conseil de la divinité
Pour finir par ta mort notre captivité,
Et tenir de l'Enfer la puissance enchaînée.
Pourrez-vous bien, mes yeux, dans les torrents de pleurs
Qui vous vont submerger, regarder ces douleurs
Dont nos plus grands tourments ne sont que des figures ?
Pourrez-vous, ma raison, les voir sans vous troubler ?
Et pourrez-vous bien croire, ô vous races futures,
Ce que ma voix ne peut vous dire sans trembler ?

XLVI.

Celui qui donne aux champs tant de moissons dorées,
Qui fait naître les fruits sous des feuillages verts,
Qui pare les oiseaux de plumages divers,
Et couvre les poissons d'écailles azurées :
Ainsi qu'un vermisseau se voit sans vêtement
Exposer aux rigueurs de tous les Éléments
Par un cruel mépris qui tout autre surmonte.
Mais, Barbares, en vain vous faites ces efforts
Pour mettre un Dieu tout nu, puisque sa chaste honte
Comme un voile de pourpre enveloppe son corps.