Page:Robert Arnauld d'Andilly - Stances Pour Jésus-Christ.djvu/37

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LXI.

Mais je vois le Soleil tout couvert de ténèbres,
Plus obscur dans le Ciel que dans le sein des eaux,
Donner si peu d'éclat aux célestes flambeaux,
Qu'ils ne paraissent plus que des torches funèbres.
Terre, ton rédempteur n'est plus loin du cercueil :
Déjà tout l'univers est tapissé de deuil,
Et pour l'ensevelir le temple rompt ses voiles.
Fais mon unique amour, par ton divin secours,
Que nos cœurs enflammés servent au lieu d'étoiles
Pour éclairer la nuit qui va finir tes jours.

LXII.

Quelle tragique voix mes oreilles étonne,
Et fais de mes deux yeux deux fontaines de pleurs ?
Toi qui semblais muet au milieu des douleurs,
Tu te plains désormais que ton Dieu t'abandonne.
Mais il te faut souffrir pour suprême tourment
L'état anéanti de ce délaissement
Qui réduit tout esprit en si grande agonie.
En vain tant de bourreaux seraient tes ennemis,
Jamais leurs cruautés n'auraient fini ta vie,
Si ton père éternel ne l'eut ainsi permis.