Aller au contenu

Page:Robert Brasillach - Le Procès de Jeanne d'Arc (1941).djvu/21

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Pourquoi s’excuser, et quelle est cette timidité étrange ? Le catholicisme ne nous enseigne-t-il pas que l’homme doit s’efforcer à l’Imitation du Christ, et que les saints sont les êtres qui ont le plus merveilleusement pastiché la ressemblance du Seigneur ? Jusque dans leur corps, certains d’entre eux ont, à force d’amour, retrouvé les stigmates de la Croix, des Clous et de la Lance. Mais, avant même son supplice et ses défaillances, avant son Calvaire et son Jardin des Oliviers, avant même d’être condamnée par les prêtres, d’être trahie par Judas, d’être vendue pour trente deniers, avant Anne et Caïphe, avant que Pilate, qui s’appelait Le Bouteiller, bailli, se fût lavé les mains de l’exécution et n’eût même pas pris la peine de notifier sa sentence, Jeanne avait d’abord imité Jésus dans sa parole et dans son cœur.

C’est sa parole que nous rapporte cet étrange Évangile, ruisselant de clartés, qu’est le texte de son Procès. Encore les juges se sont-ils efforcés, sans aucun doute, d’obscurcir la lumière qui les confond. Car il nous faut bien songer que cet Évangile est un Évangile selon Ponce-Pilate, et que nous ne connaissons l’admirable jeune fille qu’à travers ses ennemis. Ne parlons pas seulement d’une « information posthume », où, devant Cauchon, les juges vinrent déposer tour à tour que Jeanne, le matin de sa mort, renia ses voix et se repentit. Elle est trop bien faite, elle veut trop prouver pour qu’on puisse en admettre les conclusions : des contradictions subtiles y fourmillent d’ailleurs. N’en parlons pas, puisque les notaires eux-mêmes ont refusé de l’authentifier par leur signature, dans un scrupule bien tardif. Mais le reste du Procès, qu’on y songe, est également soumis à caution. On n’a rien fait dire à Jeanne qui puisse réellement scandaliser les âmes, mais on a omis certaines de ses réponses. Cela, nous le savons par le Procès de Réhabilitation, œuvre juste s’il en fut, mais farce ignoble où, à