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ment promener son comité avec désinvolture. C’est dans l’ordre naturel des choses. »

Le député Rouquayrol était célibataire. Sa maison était tenue par sa tante, une bonne dame de province, très bourgeoise d’allures, et par son comité de surveillance. — À la bonne tante étaient dévolus les soins du ménage matériel, au comité de surveillance le ménage moral du député.

Surveillant en service de nuit.
Surveillant en service de nuit.

Le caractère de sévérité et de puritanisme donné à la maison provenait de la vigilance du comité, toujours en éveil. Tout ce qui dans le mobilier manquait de cette sévérité, avait été peu à peu exilé au grenier, depuis l’élection de Rouquayrol.

Préférences artistiques du Comité.
Préférences artistiques du Comité.

Le député possédait un canapé sur lequel, étant étudiant, il avait aimé à fumer de douces cigarettes et à rêver sur les bouquins de jurisprudence ; ce canapé avait été enlevé et avec lui tous les fauteuils de la maison. Le fauteuil de bureau dans lequel, sous prétexte de méditations politiques, Rouquayrol s’endormait quelquefois, avait suivi le canapé. Les tapis avaient été supprimés comme insultants pour la noble simplicité des électeurs.

Après les meubles, le comité avait un beau matin soumis à un examen sévère les tableaux accrochés aux lambris de leur victime.

Tout ce qui, en fait de tableaux ou gravures, avait été trouvé entaché de ce caractère amollissant et rétrograde propre, hélas ! à la grande majorité des œuvres d’art exécutées depuis le commencement du monde, avait dû être, sur l’heure, impitoyablement décroché. De simples paysages représentant des sites espagnols et norvégiens ne trouvèrent même pas grâce devant la rigidité des principes du comité. Ces vues, pour être pittoresques, n’en avaient pas moins été inspirées par des pays monarchiques, et comme