Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/178

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.


Mlle Malicorne, entraînant Hélène, s’enfuit, suffoquée d’indignation, dans la salle réservée aux avocats.

Son aventure était déjà connue de ses confrères qui en faisaient des gorges chaudes. Un avocat masculin eut même l’impudence de féliciter son éminente confrère pour son double succès.

Le directeur de la Maison de retraite.
Le directeur de la Maison de retraite.

« Succès d’avocate et succès de jolie femme, dit-il, vous avz mieux fait que d’attendrir de simples jurés, vous avez attendri le criminel lui-même ! … Ah, ce n’est pas nous, pauvres avocats masculins, qui recueillerions de pareils succès ! …

— L’épouserez-vous ? demanda malicieusement une avocate vouée aux procès en séparation et coups de canif.

— Si nous devions épouser nos clients, je préférerais comme vous ne m’occuper que des maris séparés à consoler, répondit Mlle Malicorne faisant allusion à certains cancans de la salle des pas perdus, d’après lesquels la jeune avocate, prenant trop fortement à cœur la cause de ses clients, aurait à plusieurs reprises prodigué de douces consolations extra-judiciaires à de malheureux maris plaidant en séparation.

Les avocats masculins se frottaient les mains, tout prêts à crier bravo.

« Vous êtes trop charmantes, mesdames, voilà votre grand défaut ; vous sensibilisez jusqu’aux criminels… il ne devrait être permis qu’aux femmes pourvues d’un bon certificat de laideur de se faire inscrire au barreau.

— Allons, laissons ces persifleurs, ils osent nous reprocher.de trop émouvoir notre auditoire, eux qui endorment jusqu’aux gendarmes. »