Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/231

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trente-cinq ans de stage… voilà pourquoi vous avez intérêt à vous faire inscrire de bonne heure… vous ferez vos visites demain. »

Hélène se retira dans sa chambre sur cette parole. Elle s’endormit joyeuse d’en avoir fini avec le Conservatoire, et se vit déjà en rêve assise sur un fauteuil à palmes vertes, sous la grande coupole de l’Institut.

M. Ponto la réveilla le lendemain matin de bonne heure par la sonnerie de son téléphone de chevet.

« Dépêchez-vous, disait-il, mettez-vous en toilette de cérémonie, vous commencez vos visites tout de suite ; j’ai demandé par téléphone au concierge de l’Institut l’adresse des académiciens à visiter… »

Hélène se hâta de s’habiller. Elle endossa une toilette délicieuse, à la fois élégante et sérieuse, une jaquette bleu lophophore avec jupe à retroussis, relevée au genou et laissant voir les culottes de velours et les bas de soie noire.

Elle déjeuna seule, ses cousines Barbe et Barnabette étant à leurs bureaux de la Banque et Mme Ponto déjà partie. M. Ponto redemandait un supplément de renseignements au concierge de l’Institut. Il arriva bientôt avec une longue liste d’adresses.

« Voici, dit-il, tous les renseignements qui vous sont nécessaires.

— Est-ce qu’il faut que je voie les quatre cents membres de l’Académie ?

— Non, vous comprenez que la vie des candidats se passerait en visites… vous n’avez à voir que les chanceliers ; chaque groupe de quarante académiciens a un chancelier, cela fait dix chanceliers, car vous n’avez pas à vous occuper des deux cents strapontins… Voici les noms et adresses, avec quelques petits renseignements sur les œuvres de ces messieurs… vous aurez soin de semer adroitement quelques titres d’ouvrages dans la conversation…

— Et j’y vais seule ? demanda timidement Hélène.

— Sans doute !

— Oh ! que c’est loin ! fit Hélène en consultant sa liste : voici un académicien qui demeure à Bordeaux…

— Une heure par le tube de Paris-Madrid-Oran, avec la course pour la gare…

— Et un autre à Dunkerque.

— Un quart d’heure de tube… Les autres sont à Paris même ou dans les environs, à Orléans… Compiègne… En trois jours vous pouvez en avoir fini avec vos visites. Commencez par l’académicien de Bordeaux. »