Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/311

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tuteur a dû vous transmettre la demande que j’ai eu l’honneur de lui faire… il m’a autorisé à vous parler, j’ai l’espoir que vous voudrez bien ne pas refuser de m’entendre… Mademoiselle, mon bonheur est entre vos mains ! je vous aime, mademoiselle ! Depuis que j’ai eu le bonheur de vous apercevoir, mon cœur est plein de votre image… un trouble délicieux s’est emparé de mon âme… Ce matin, sur la plate-forme, quand mon parapluie…

— Quoi ! dit Hélène, c’était à vous le parapluie ?

— C’était à moi ! voyez mes initiales J. M., Jules Montgiscard, sur le manche…

— Combien je dois vous remercier ! dit Hélène après avoir vérifié les initiales sur le parapluie rapporté par elle comme trophée de sa victoire ; sans la chute providentielle de votre parapluie, l’épée de mon adversaire me transperçait !

— Je l’ai bien vu ! c’est pour cela que j’ai lancé ce parapluie sur elle…

— Comment, vous l’aviez fait exprès ?

— Certainement et j’ai réussi !

— Monsieur, recevez tous mes remerciements, vous m’avez sauvé la vie !

— Ah ! mademoiselle, permettez-moi de vous consacrer la mienne. J’ai vingt-huit ans, mademoiselle, je suis blond, je dirige la grande maison Montgiscard fils et Cie, la première maison pour les papiers et cartons de construction, cinq cent mille francs de bénéfices nets pour ma part tous les ans… L’usine marche toute seule et ne me prend que deux heures par jour… j’ai une maison de campagne d’hiver à Menton et un aérochalet pour l’été… Voulez-vous me donner une heure tous les jours pour causer avec vous ?

— Je ne puis refuser cela à mon sauveur, répondit Hélène.

— Alors, tous les jours de cinq à six, voulez-vous ?… J’espère arriver à toucher votre cœur… Voulez-vous me permettre de vous envoyer ma photographie ?

— Je la recevrai avec reconnaissance ! »

Le premier entretien s’arrêta là. Hélène reçut dans la soirée un paquet de photographies de M. Montgiscard, de face, de profil et de trois quarts, en pied, à mi-corps et en buste. Il n’était pas mal, ce jeune homme, et il avait une barbe blonde agréablement frisottée.