Page:Robida - Le vingtième siècle, 1883.djvu/467

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vers la Perse, l’Inde et la Chine. Les populations, jadis errantes, du Turkestan et de la Boukharie se sont fixées au sol et, en devenant sédentaires, se sont très améliorées comme caractère. Le vol et le pillage à main armée, qui étaient dans leurs habitudes, ne sont plus pratiqués que dans les campagnes très reculées.

La Chine seule, lorsqu’elle est en mal de révolution, est parfois dangereuse à traverser. Ce pays est en proie à des bouleversements irréguliers ; tous les trois ou quatre ans, le Fils du Ciel est renversé de son trône et la guerre civile porte partout ses ravages. La république est proclamée dans une moitié du pays ; six mois après, le Fils du Ciel reprend Pékin, l’ordre renaît, puis le branle-bas recommence. La Chine finira dans la démagogie, si le Fils du Ciel ne se décide pas, pendant qu’il en est temps encore, à adopter franchement et sincèrement les principes ennuyeux, mais sauveurs du parlementarisme.

L’Albatros fit un voyage magnifique. Ses passagers assistèrent à l’ouverture des Chambres à Boukhara, ils s’arrêtèrent vingt-quatre heures sur le lac Khou-Khou-Noor et vingt-quatre heures à Pékin où les ruines laissées par la Commune de Pékin étaient visibles encore. Le Japon ne les intéressa pas beaucoup. Yeddo ressemblait trop à Paris. Les temples de Bouddha étaient remplacés par des usines et les maisons de thé par des établissements de bouillon. Hélas ! où était le temps des Japonaises à robes multicolores, des gentilshommes à trois sabres ! Envolé ! disparu ! avec toute la poésie et tout le pittoresque du pays ! Tous les Japonais ont des chapeaux de haute forme et des redingotes ; on en voit même, ô comble de l’horreur ! avec des blouses et des casquettes !

La traversée de l’océan Pacifique se fit dans les meilleures conditions. Philippe, très prudent, suivit pour plus de sécurité la route des navires, semée d’îlots factices à tous les degrés, au point de croisement des longitudes avec les latitudes.

On sait que les grandes compagnies maritimes associées ont établi sur les principales routes suivies par les navires des lignes d’îlots factices, échelonnés de vingt-cinq lieues en vingt-cinq lieues, solidement ancrés au sol quand le fond n’est pas trop bas et amarrés à un système de bouées immobiles, quand la trop grande profondeur empêche de mouiller des ancres.

Sur ces îlots les navires trouvent des dépôts de vivres, des magasins pour les réparations et, en cas de malheur, des maisons ou tout au moins