Pourriez-vous donner le nom de courtois et
généreux à un homme qui, recevant chez lui
un hôte noble et puissant, ne lui donnerait
pendant longtemps à manger que d’un seul
mets commun et grossier, tandis qu’il aurait
chez lui des vivres en abondance ? Et que penser
de la prévoyance d’une tendre mère qui ne
donnerait à ses enfants bien-aimés que ce
qu’elle prodigue libéralement aux lapins et aux
mouches ?
„ Je pourrais vous dire encore, pour vous prouver que ce genre d’amour est un instinct naturel et non pas un caprice de notre fantaisie, un jeu de notre volonté, que la nature en a jeté, comme en se jouant, le goût chez les animaux ; et à cela qu’auriez-vous à répondre ? Il est vrai qu’ayant les sens moins délicats que les hommes, les bêtes ne savent pas mettre le comble à leurs jouissances en les raisonnant, parce qu’elles n’ont pas une pleine connaissance de ces sortes de douceurs. Mais, sans les désirer aussi ardemment que les hommes, elles en jouissent dans la mesure de leurs facultés, et aucune n’en est privée complétement.