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Page:Rod - L’Innocente, 1897.djvu/55

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rian, qui s’entendait à merveille avec son gendre, commençait à vieillir. Toujours gaie, le rire facile et clair, la jeune comtesse avait trouvé moyen de transformer le château par les inventions de son esprit enjoué. C’est surtout pendant cette période qu’elle me fut bonne et chère. Elle venait souvent à la maison, quelquefois pour un instant :

— Bonjour ! C’est moi, je passe !…

Un rayon de soleil qui entre et se retire, une fée dont l’ombre amicale s’estompe sur le clair de lune et disparaît. Son passage, si rapide qu’il fût, nous mettait tous en joie. Le visage de mon père s’illuminait ; ma mère souriait, tout heureuse de se lever, pour la visiteuse, du fauteuil où ses souffrances l’immobilisaient souvent. Moi, je courais dans les bras de ma marraine :

— Eh bien, filleul, es-tu sage ?

Le petit sac qu’elle portait d’habitude avec elle cachait toujours quelque surprise. Quand elle n’en avait aucune, elle me donnait une fleur, et j’étais aussi content que d’un jouet ou d’un bonbon, parce que ses fleurs à elle ne ressemblaient point à celles que je pouvais cueillir au jardin ou dans la prairie. Avant de me les offrir, ma marraine les touchait de sa baguette magique, dont elles recevaient des couleurs plus vives, un meilleur parfum…

J’interrompis Philippe et j’insinuai :