Page:Rodenbach - Bruges-la-Morte, Flammarion.djvu/218

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un ennui, une solitude plus grande, puisque la vieille servante avait peu à peu fait partie de sa vie. Tout cela à cause de Jane, cette femme inconsistante, cruelle. Ah ! ce qu’il avait déjà souffert par elle !

Il aurait bien voulu maintenant qu’elle ne vînt pas. Il se trouva triste, inquiet, énervé. Il songea à la morte… Comment avait-il pu croire au mensonge de cette ressemblance, vite ébréché ? Et qu’est-ce qu’elle devait penser, dans l’au-delà de la tombe, de l’arrivée d’une autre au foyer encore plein d’elle, s’asseyant dans les fauteuils où elle s’était assise, superposant, au fil des miroirs en qui le visage des morts subsiste, sa face à la sienne ?

On sonna. Hugues fut forcé d’aller ouvrir lui-même. C’était Jane, en retard, rouge d’avoir marché vite. Elle pénétra, brusque, impérieuse, engloba d’un coup d’œil le grand corridor, les salons aux portes ouvertes. Déjà on entendait des échos de musiques lointaines, se rapprochant.