Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/134

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ce type de Durtal, apparu déjà en un précédent livre, semble raconter ses propres états d’esprit et se transposer en une personnelle et successive vivisection d’âme.

Il y a lieu de le supposer d’autant plus que, parmi les causes de ce ralliement à Dieu, le romancier signale, chez Durtal, l’ennui de vivre et le dégoût du monde.

Or M. Huysmans aussi nous offre encore une fois les mêmes symptômes personnels depuis ces dernières années. Il a avéré une misanthropie sincère. Après avoir fréquenté des artistes, des écrivains, naguère, il s’est soudain replié sur lui-même, comme le converti du roman, lui aussi solitaire, aigri, malade, dépris, n’allant nulle part, ayant renoncé aux milieux littéraires et mondains où sa noble nature franche ne pouvait s’accommoder des mensonges, vilenies, abdications, promiscuités. Isolement logique ! Subtil et magnifique dans son art, il devait se trouver, en s’élevant, de plus en plus isolé. Qui ressemble aux grandes âmes ? L’océan gémit parce qu’il est dépareillé. Tous les traits et les mobiles qu’il prête à Durtal, sa vie elle-même nous en offre l’exemple. N’est-il donc pas permis d’imaginer que cette crise religieuse qu’il peint avec tant d’intensité fut la sienne ? Voyez alors l’avertissement singulier de la destinée et les les correspondances mystérieuses entre les