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livre, Les Bretons celui du clerc Loïc Daulas pour Anna, la fille du vieux fermier Hoël. Les noms changent ; le sujet du poème demeure ; c’est la même analyse émue de ce qu’on pourrait appeler la puberté du cœur qui souvent devance l’autre et, pour cela même, est sans désirs. Chaste aurore de l’amour ! Éveil des tendresses partagées ! Premières floraisons dans le verger de l’âme ! Rames appariées dans le port avant que la marée du sexe afflue et entraîne l’amour dans la pleine mer et les orages !

Cet amour-ci, tumultueux, exaspéré par les sens, Musset en est l’éloquent poète — le poète des vingt ans ! — tandis que Brizeux restera le virginal notateur des amours de la quinzième année ; et, comme s’il en devait annoncer physiquement la vocation, voilà — à en croire les portraits gardés de lui — qu’il avait lui-même comme une mince et mystique tête de premier communiant !

Certes, les idylle de Marie demeurent le plus durable de son œuvre, mais son originalité lui vint aussi de son zèle à transposer dans ses poèmes toutes les choses de sa Bretagne natale : les noms, légendes, traditions, coutumes, jeux et croyances. Depuis, combien de poètes ont