Page:Rodenbach - L’Élite, 1899.djvu/249

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Cette aptitude à tout, cette fécondité inlassable sont un des signes de la maîtrise. M. Besnard le possède et, en outre, toutes les autres qualités d’un maître : franchise d’un dessin sûr de lui-même, combinaisons inédites de lignes, audace et science d’un coloris qui éclate en harmonies neuves. Mais il y a plus : la peinture, chez lui, ne cesse pas d’être elle-même pour exprimer des idées ; et c’est ainsi qu’il y apporta un élément d’absolue nouveauté : la représentation d’un Idéal selon la Science par des moyens plastiques. La Science est jalouse, exclusive. Le grand rêve du siècle, c’aura été de réussir quelque alliance avec elle : tantôt l’accord de la Science et de la Foi ; puis celui de la Science et de la Littérature ; or. M. Besnard a vraiment réalisé l’accord de la Science et de l’Art. Il eut vite fait de renoncer, lui, aux dieux et aux héros de Delacroix, lequel ne voyait dans la vie que l’éternel conflit de l’humain et du divin, de la Religion et de l’Histoire. Mais leurs calmes ou tumultueuses tuniques sont un peu le vestiaire des siècles ; l’Art s’y est trop souvent habillé. M. Besnard est autrement novateur et moderne : avec une vision positiviste de la vie, il nous évoque le drame unique de la Nature où les Forces évoluent en des Formes et des Couleurs changeantes, selon une Loi incommutable.

De sorte que s’il fallait offrir un emblème