Page:Rodenbach - L’Arbre, 1899.djvu/77

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un tourbillon de vendangeurs se disputant des grappes. La vieille Barbara Lam, qui avait des peurs nerveuses d’enfant, s’effraya : « Qu’est-ce qu’ils font ? » Tout à coup un cri retentit : « La corde ! » C’était, en effet, la corde du pendu à laquelle on n’osa pas toucher d’abord ; mais quand le cadavre traversa la Grand’Place, un groupe s’enhardit, s’étant ressouvenu de la vieille croyance superstitieuse et coupa la corde. Alors, ce fut une bataille. Chacun en voulait un morceau. La corde ne cédait pas. Elle lia bientôt des groupes frénétiques, sans cesse renaissants, les affola, les tirailla, les mena en tous sens, sans se donner… Elle venait d’aboutir à la salle de danse où tous ceux qui étaient là, à leur