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LES JOURS MAUVAIS.


Et vaincu, tout un soir dans l’ombre, sans flambeau,
On enlace une chair que le spasme importune,
Triste comme les morts caressant sous la lune
L’ange de marbre blanc couché sur leur tombeau !


II



Mais quel retour navré dans le matin vermeil
Avec le grand dégoût d’une nuit de débauche,
Quand, parmi les rumeurs du plein jour qui s’ébauche,
L’âme aussi s’ensanglante aux flèches du soleil !

On va comme un voleur qui s’esquive et se sauve
Ne regardant personne et longeant les murs gris ;
On sent encor sur soi de la poudre de riz,
Et le reste obsédant des senteurs de l’alcôve.

Il semble que l’on épande une odeur de péchés !
Et dans le brouillard pâle où meurent les lanternes,
Les passants matineux plaquent des ombres ternes
Comme des remords noirs au cœur des débauchés.