Page:Rodenbach - La Jeunesse blanche, 1913.djvu/171

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
168
VERS D’AMOUR


Je t’aime, ô mon amour, parce que l’un et l’autre
L’infini nous sépare ainsi qu’un noir témoin,
Puisque, même enlacés, nous nous sentons si loin
Sans jamais pouvoir faire un seul cœur qui soit nôtre !

Car nous sommes pareils à des miroirs jumeaux
Où tout se mire et luit d’identique manière,
Mais l’ombre de la nuit absorbe la lumière
Et nous nous sentons loin dans l’exil des trumeaux.

Ô cœur semblable au mien ― cœur profond qui m’évoques
Un ciel d’automne, un ciel maladif et changeant
Où fleurit, parmi les nuages voyageant,
Toute une floraison d’étoiles équivoques !