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II


Godelieve, en se fixant désormais au foyer de Joris, y apporta, non pas encore une embellie, mais une accalmie. Barbe se contint davantage, refréna ses emportements, son humeur sans cesse cabrée, ses irritations continuelles contre son mari, un peu distraite et influencée par la présence de sa sœur. Contagion de la douceur ! Godelieve était tombée là comme un sachet de silence dans la forêt, comme la coupe de Thulé dans la mer. Elle apparaissait si amène, avec son visage ogival, son front lisse et pur comme le mur d’un temple, ses beaux cheveux de miel. Et une voix de la couleur de ses cheveux, que jamais aucune impatience ne fonçait, caractère uniforme et placide, docile à tout, de la docilité des canaux où les ciels et les demeures, en se reflétant, s’immobilisent. Godelieve aussi était un miroir de calme.

La vieille demeure du Dyver, derrière son rideau d’arbres toujours inquiets, se pacifia un peu, s’apaisa