Page:Rodenbach - Le Carillonneur, Charpentier, 1897.djvu/196

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vastes mantes, dont le capuchon s’évase en forme de bénitier. Elles s’identifiaient de plus en plus avec l’ombre commençante. Seuls, les vitraux irradiaient encore. Les rosaces faisaient la roue. C’étaient des paons bleus, d’orgueil immobile. Un vaste silence. On n’entendait que le crépitement de quelques bougies, le craquement intermittent du bois des confessionnaux ou des stalles, cette vague respiration des choses endormies. La polychromie ardente des murs et des colonnes se décolorait. Un crêpe invisible descendait sur tout. Une odeur d’encens fané, de gloire moisie, de poussière des siècles régnait. Les visages des vieux tableaux mouraient. On pensait aux ossements des reliquaires.

Godelieve attendait, un peu en émoi et en mélancolie. Elle s’était agenouillée sur une chaise, s’enveloppa d’un signe de croix, chercha dans son Paroissien la messe pour la bénédiction du mariage. Quand elle l’eut trouvée, elle se signa de nouveau et commença à lire l’Introït, les yeux sur la page, épelant les mots avec un lent remuement des lèvres, pour éviter toute distraction qui aurait été sacrilège. Malgré cela, elle suivait mal le texte, inquiète et troublée, se relevant à tout instant, regardant derrière elle et jusqu’au fond de l’église, au moindre bruit qui retentissait sur les dalles.

Alors elle joignit les mains et, les yeux vers l’autel, elle pria ardemment l’Agneau pascal, tout en or, chargé d’une croix, qui est figuré sur la porte tour-