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II


Le soir du concours, Borluut alla, vers neuf heures, chez le vieil antiquaire Van Hulle, son ami, comme il en avait l’habitude chaque lundi. Celui-ci habitait, rue des Corroyeurs Noirs, une antique demeure à double pignon dont la façade en briques s’historiait, au-dessus de la porte, d’un bas-relief représentant un navire, aux voiles gonflées comme des seins. Ç’avait été autrefois le siège de la corporation des bateliers à Bruges, et la date de 1578, authentique dans un cartouche, affirmait sa noble ancienneté. La porte, les serrures, les vitraux, tout avait été savamment reconstitué selon les vieux styles, tandis que les briques furent mises à nu, rejointoyées à neuf, avec, çà et là, la patine des années laissée intacte sur les pierres. Cette précieuse restauration, c’est Borluut qui l’avait exécutée pour son ami, à ses débuts pour ainsi dire, et sortant à peine de l’académie où il avait fait ses études