Page:Rodenbach - Le Carillonneur, Charpentier, 1897.djvu/87

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leur maisonnette, de l’air dont une brebis rentre au bercail. Il avait étudié et fixé quelques-unes de leurs attitudes, leurs gestes frileux, leur marche gothique, les vols blancs, aux calmes envergures, de leurs cornettes, surtout les plis en tuyaux d’orgue de leurs robes noires. Il avait rêvé être le peintre des béguines, exécuta quelques tableaux inspirés par elles, accumula des dessins, des croquis sans nombre, toujours embusqué derrière ses vitres, les yeux à l’affût. Puis il s’était dépris, trouvant cet art encore trop matériel, trop lié uniquement à la forme à la pure plastique de la vie. Il chercha en lui, s’orienta ailleurs.

Aujourd’hui, la nouvelle de Borluut venait encore une fois bouleverser son idéal, bouleverser sa vie.

— Eh bien ! tu es content ? demanda son ami, le voyant assez indifférent.

— J’aurais été heureux, il y a quelques années, répondit le peintre. Maintenant, je songeais à d’autres formules.

— Mais tu étais doué surtout, disais-tu, pour la fresque. Tu proclamais la décoration le mode suprême de la peinture.

— Peut-être ; mais il y a de la peinture plus intéressante.

Alors Bartholomeus marcha vers les coins de l’ancien parloir de béguines, aux murs clairs, qui lui servait d’atelier ; il remua des toiles, des œuvres