Mais le mal est au cœur qui s’afflige dessous,
Cœur impressionnable et sous trop d’influences
Puisque le ciel, jusqu’aux plus minimes nuances,
Rêve d’y transvaser son infini changeant.
À peine d’elle-même et de son cœur qui dure
Quelques endimanchés nénuphars émergeant
Comme son propre songe en un peu de verdure…
Maladif cœur de l’eau qui ne s’appartient pas !
Mais si soumise au ciel, si faible l’eau soit-elle,
Elle cache sa peine en de muets combats,
Sachet inviolé dans des plis de dentelle !
Pourtant on la devine en proie à l’idéal
Et qu’elle a les langueurs, sous ses ondes mobiles,
Des filles de treize ans qui deviennent nubiles.
Et l’on dirait aussi que, parmi l’eau, le mal
Mystérieux d’une puberté s’élabore :
Troubles, frissons, pâleurs, émoi d’on ne sait quoi,
Quand chaque nénuphar comme un sein vient d’éclore,
Sein nouveau-né, doux gonflement qui se tient coi !
Ah ! Ce cœur de l’eau vaste en qui tout s’amalgame,
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