Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/124

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Eh bien, non ! je veux croire et prier et me taire ;
Dieu m’a mis son image au cœur en me créant,
Et quel que soit le deuil, quel que soit le mystère,
Avec elle je veux me sauver du néant !…

J’irai droit mon chemin, sans orgueil, sans blasphème,
Comme un banni qui rêve à son pays natal ;
Indulgent pour chacun, sévère pour moi-même,
Car l’homme peut choisir dans un milieu fatal.

Oui, je crois que Dieu vit ; oui, je crois que Dieu règne !…
Et quoique les bonheurs d’ici-bas soient tous vains,
Quoiqu’on ne trouve pas une âme qui ne saigne
Et ne tremble à l’assaut de ses rêves divins,

J’ai vu, dans l’ombre où va la caravane humaine,
Que rayonnait sur elle un Idéal de feu,
Et j’y sens un reflet de l’Être qui nous mène :
C’est par le cœur qu’on apprend Dieu !…