Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/57

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Il y colla son œil : dans le musée, un cierge
Rayonnait ; l’enfant crut que c’était une vierge,
Et sans trop raisonner, et sans trop réfléchir,
Il ouvrit, pénétra doucement pour fléchir
Ses deux petits genoux devant la sainte image
Qui semblait d’un sourire agréer son hommage !…
Puis il se releva : « C’était si beau vraiment…
« S’il pouvait l’embrasser… la tenir un moment…
« L’oncle n’en saura rien ; il ne viendra personne… »
L’enfant prend le portrait d’une main qui frissonne
Et le met à sa lèvre en tremblant, quand soudain
— Il était toujours très surveillé, le blondin —
Surpris par la servante au beau de l’entreprise,
Il lâche, en s’effrayant, le verre qui se brise !…

La servante cria, gronda, pesta, pleura :
« Son vieux maître jamais ne se consolera !…
« S’il allait les chasser tous deux ?… Que va-t-il dire ?
« Il va battre l’enfant… peut-être le maudire,
« Puisque c’était sa vie entière, ce portrait,
« Et qu’en rentrant, son cœur aussi s’en briserait !… »

Et tandis qu’accroupie à terre, haletante
Et grommelant toujours à mi-voix, elle tente