Page:Rodenbach - Les Tristesses, 1879.djvu/98

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Et savourant la paix de la nuit vaporeuse
Sans rien dire, admirait cette figure heureuse
De l’enfant endormi dans les oreillers blancs,
Comme la lune au fond des nuages tremblants !

O Nature ! pourquoi toujours briser nos rêves ?
Et mettre le reflux prés du flux sur nos grèves ?
Pourquoi, quand les oiseaux babillent dans les bois,
Cet enfant devait-il muet, triste et sans voix,
Près de sa mère en pleurs, grandir sans rien apprendre,
Ne pas être compris et ne pas la comprendre !…

La mère qui sait tout, en longs vêtements noirs,
N’osant sortir le jour, se promène les soirs
Conduisant par la main le petit muet pâle,
Et, comme un saint qui veille une pierre tombale,
Lui jetant, sans rien dire, un regard adouci :
L’enfant ne parlant pas, elle s’est tue aussi !…