Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/125

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L’amour ? Frivole jeu ! Vain espoir d’être aimé !
Vouloir toujours dans son âme le temps de mai !
Comme on s’acharne après cette folle chimère
De se sentir, avec un autre, congénère,
De ne plus être seul, ni deux, mais un enfin…
Rêve illusoire ! On est deux miroirs face à face
Se renvoyant quelques reflets à leur surface…
Ah ! s’être, fût-ce un jour, réalisé divin !
Avoir enclos l’éternité dans des minutes !
Mais c’était se vouer à d’impossibles luttes,
Car on ne peut pas faire avec deux corps un cœur,
On n’entre pas de force ainsi dans le bonheur !
Vanité que tous ces essais de bucolique,
Ces fièvres, ces baisers, ces brèves pâmoisons,
D’où l’on sort vide et vraiment trop mélancolique.

Quant aux quotidiens conquérants de toisons,
Futile aussi, leur appétit de renommée.
(La gloire ? écrire un peu son nom dans la fumée !)
Ah ! combien vains tous ces ambitieux cabrés
Pour être les chevaux vainqueurs dans la revue.