Page:Rodenbach - Les Vies encloses, 1896.djvu/205

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Couchant sublime ! Architectures inouïes !
Premiers astres qui font le ciel fleurdelysé !
Et là-bas, toutes ces chevelures rouies
Comme un lin fin dans un étang cristallisé,
Moisson des longs cheveux fauchés des Ophélies !

Charme de l’équivoque et des anomalies !
Vertigineux palais que des nuages font,
Auxquels à chaque instant quelque chose s’annexe ;
Nuée, en forme de montagne, qui se fond ;
Petite brume rose offerte comme un sexe ;
Vapeurs se contractant en bêtes de blason
Qui sont soudain des léopards ouvrant leurs gueules
Ou des licornes dans le soir piaffant seules ;
Puis voici d’autres jeux occupant l’horizon :
Les nuages sont purs comme des mousselines ;
On voit des communiantes dans des berlines
Qui jettent par les portières des nénuphars ;
Tout est blanc dans le ciel qui croit que c’est dimanche !

Or tout ce luxe du couchant, ce sang, ces fards,
Ces grottes, ces palais de féerie or et blanche,